Le monde de la culture est en deuil. Catherine Ribeiro, la légende de la musique expérimentalement engagée des années 60, est décédée à l’âge de 82 ans. Elle est décédée dans la nuit du 22 au 23 août 2024 à la maison de retraite Notre-Dame d’Espérance, à Martigues, dans les Bouches-du-Rhône. C’est ses proches qui ont annoncé la nouvelle à l’AFP, marquant la fin d’une époque pour ceux qui ont suivi le parcours audacieux et anticonformiste de la chanteuse. Catherine Ribeiro était une artiste à part. Née à Lyon de parents portugais immigrants en 1941, elle est surnommée la “Pasionaria rouge” ou la “grande prêtresse de la chanson française” et considérée comme la voix la plus rebelle de sa génération. Accompagnée du groupe Alpes, elle abordait dans ses chansons des thèmes politiques et sociaux dans une époque où la musique “contestataire” était peu populaire. Ses textes étaient profonds et marqués par une révolte sans fin contre les souffrances, la guerre et la politique. Un autre artiste du temps de la contestation, le chanteur et poète Léo Ferré, disait d’elle : “La beauté insoumise de Catherine et sa colère chevillée à l’âme incommodent le show-business”. Cette phrase, avant tout, souligne le fait que Ribeiro n’a jamais accepté de compromis avec l’industrie musicale à but lucratif. Pour elle, la musique était une arme, un moyen de prouver sa colère contre les oppressions de tout genre dans le monde.
Un parcours musical quelque peu atypique. Carrière de Catherine Ribeiro ne s’est limitée à la chanson. En plus, elle a fait quelques pas au cinéma. En 1963, elle a joué dans le film “Les Carabiniers”, réalisé par le même Jean-Luc Godard. Ce film revenait un tournant dans la vie artistique de Ribeiro. C’est sur le plateau de ce film qu’elle a rencontré Patrice Moullet, qui a joué le rôle principal. Deux ans plus tard, ils commencent à collaborer et créent ensemble le groupe Alpes. Ce groupe est devenu un pilier très solide de la scène musicale expérimentale. Ensemble, ils ont composé neuf albums avec des textes très engagés. Dans ses chansons, Ribeiro et Moullet ont abordé des sujets comme le Vietnam, la Palestine, les émigrés chiliens et autres. La musique pour Ribeiro était un levier pour la lutte; elle a dédié tous ses albums contre la guerre et l’oppression. Ribeiro a aussi chanté de l’écologie, avant que d’autres en parle. Ribeiro n’avait pas peur d’exprimer ses opinions même au sujet du pouvoir. Dans une de ses chansons, elle a nommé le président de la République, Valéry Giscard d’Estaing. Ribeiro était une militante – et elle n’avait peur de rien.
La vie de Catherine Ribeiro est remplie de drames personnels qui définissent sa vie et son travail. En 1984, Ribeiro épouse Claude Démoulin, maire socialiste de Sedan. Ils ont un fils, Jonathan, en 1985. Cependant, la tragédie frappe leur foyer lorsque sa fille, Ioana, de son mariage précédent, meurt des suites d’une overdose.
Ce décès et celui de son mari neuf ans après la mort de sa fille en 2009 ont jeté une ombre sur sa vie. Ses tentatives de suicide répétées témoignent de la grave détresse qu’elle a ressentie. Ribeiro a transformé cette souffrance en chansons, touchant la vie de milliers de personnes. Au cours des trois dernières décennies, Catherine Ribeiro avait vécu discrètement dans une petite maison près de la frontière allemande. En 2020, elle a subi un AVC et a été transportée dans une clinique allemande. En raison de sa mauvaise santé, elle ne peut plus vivre seule et doit déménager dans une maison de retraite à Martigues. Catherine Ribeiro est décédée en mars de cette année. Elle laissera derrière elle un héritage sans précédent dans l’histoire de la musique française. Ses chansons révolutionnaires et son style non conventionnel restent liés à tous ceux qui rejettent la société conformiste. Giulio Alfieri l’a appelée « l’héritière de Léo Ferré “, et son héritage a inspiré de nombreux artistes de rock, de jazz et de musique d’avant-garde pour son indépendance artistic.
Cette voix râpeuse et envoûtante, cet engouement inébranlable, ce chanteur qui refait l’industrie d’une manière particulière l’ont amenée à être une icône de la chanson française. Ribeiro ne s’en est jamais conformée. C’était une rebelle, une femme libre qui utilisait son art pour sensibiliser les gens et dénoncer les injustices. Sa mort incarne la disparition de certaines valeurs, mais sa musique vivra pour toujours et inspirera des générations futures. Catherine Ribeiro était une chanteuse, c’est pourquoi. Elle était aussi décrite comme un artiste politique, passionné de lutte contre l’adversité. Sa musique émet un signal fort indiquant aux gens de continuer. Elle laisse l’héritage d’une artiste spécialisée dans toute forme de lutte contre l’injustice, l’oppression politique et les démons personnels.
